Perspectives totalement inavouables

Dans les couloirs des institutions européennes, on entend parfois dire de drôles de choses qui n’ont pas vocation à être publiquement exprimées. De délicates questions sont posées mais laissées sans réponse : de combien faudrait-il diminuer la dette publique pour qu’elle devienne soutenable ? comment rendre sa réduction compatible avec les règles ? Et cela n’avance pas.

De son côté, Olivier Blanchard, qui préside l’Association des économistes américains après avoir été le chef économiste du FMI, persévère. Serait-il si mauvais que cela, s’interroge-t-il, de conserver un niveau de dette élevé dans l’environnement de faible taux d’intérêt que nous connaissons ? Faisant valoir que tant que la croissance sera supérieure au taux de financement de la dette, le ratio dette/PIB diminuera en la faisant simplement rouler (en la refinançant lorsqu’elle vient à échéance), il en conclut que les fonds disponibles sont dans ce cas mieux affectés à des investissements productifs qu’à la réduction de la dette. Dans le but d’accroître la croissance et d’aider au désendettement.

Olivier Blanchard avait en tête les États-Unis lorsqu’il a produit ce raisonnement, mais il pourrait tout aussi bien s’appliquer à l’Europe. Mais la « volonté politique » y fait notoirement défaut, bloquée par la puissance du dogme qui lie le désendettement à des réformes censées libérer la croissance, mais qui n’y parvient pas car au contraire elle se tasse…
Si tous les éléments connus convergent pour prédire dans les années à venir un faible taux de croissance, les échos recueillis aussi bien du côté de la Fed que de la BCE témoignent d’une prudence accentuée en matière d’augmentation de leurs taux directeurs. Nous restons dans l’épure d’Olivier Blanchard.

Ce pourrait être tout juste, si l’on en croit les dernières prévisions en date de la Banque Mondiale. Atteignant tout au plus 2% cette année, la croissance baissera à 1,6% en 2020 dans les pays industriels. La baisse de régime atteindra la Chine et l’Inde, deux gros contributeurs à la croissance mondiale.

Mais il faut relativiser ces chiffres, ces prévisions étant inférieures à celles du FMI en raison de leur mode de calcul. Elles se basent sur le PIB de chaque pays en monnaie nationale avant de les convertir en dollar américain, alors que le FMI calcule en « parité de pouvoir d’achat ».

Comment se débarrasser de la dette est une bonne question, comment ne pas recommencer à la creuser doit la suivre. En attendant des mesures plus drastiques destinées à couper les ailes et les pattes de la spéculation boursière, ce canard sans tête, des mesures fiscales la pénalisant permettraient de réorienter les investissements vers l’économie, la verte plus particulièrement, afin d’assurer la transition énergétique.

 

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